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    Le président.

    « Si vous voulez bien approcher, vous mettre en ligne devant la barre. Celui qui aura à répondre aux questions s'approchera du micro. Merci.

    Est-ce que les parties civiles ont des questions à poser ? »

    L'avocat de la partie civile.

    « Oui monsieur le président. Je me suis constitué pour la propriété. J'ai plusieurs questions à poser. La première à monsieur le commissaire Novaro : où en est exactement la coopération policière internationale que vous évoquiez dans votre rapport ? Est-ce que c'est au stade de la réflexion éthérée ou est-ce qu'il y a quelque chose de réellement mis en place ? »

    Pierre Novaro.

    « Aujourd'hui, on peut s'appuyer sur les instruments de coopération existants, on n'est pas dans un vide de coopération internationale absolu. Pour améliorer ce qui existe, il y a d'une part des lieux de réflexion au niveau de l'Union Européenne. C'est une coopération qui se fera entre quinze pays auxquels sont associés quatre pays tiers -- les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle Zélande -- pour mettre en place des instruments plus rapides. Deuxièmement, on essaye d'envisager quels pourraient être les statuts ; ce qui pourrait être amélioré, par exemple, les exigences des services légalement autorisés en matière de travail sur Internet, ce qu'on appelle les IUR, International Users Requirements -- puisque Internet nous conduit de temps en temps à prononcer quelques mots en anglais. »

    Le président.

    « Dans cette cour, c'est le moins possible parce que depuis François Ier, on ne peut parler que français, sauf s'il n'y a pas d'équivalent français dans votre traduction… »

    -- Alors parlons des exigences pour les services légalement autorisés.

    -- Ha ! Monsieur Toubon qui avait voté la loi, sera ravi de vous entendre.

    -- Deuxième élément, c'est peut-être à envisager et cela se ferait dans un deuxième temps, une coopération sur les procédures à l'intérieur de chaque pays et puis ensuite, on verra si on peut étendre l'assise des pays concernés, c'est-à-dire quinze plus quatre. Puis sur le fond du droit, on verra ce qu'il est possible de faire. En attendant, on commence par petits pas, d'abord avec la mise en place de ces exigences. »

    L'avocat de la partie civile.

    « D'accord, je retiens que vous envisagez… on commence… on verra…

    -- Mais nous avons déjà des instruments !

    -- Des interpellations ?

    -- Absolument ! »

    Le président.

    « Ce n'est pas des y'a qu'à, des faut qu'on, c'est également on va ?

    -- Nous avons des instruments de coopération internationale.

    -- D'autres questions à d'autres témoins ? »

    L'avocat de la partie civile.

    « Oui, à monsieur Beaussant. Monsieur, avez-vous une idée des pertes engendrées à vos adhérents par les reproductions et diffusions illicites d'œuvres sur le réseau ? »

    Antoine Beaussant.

    « Nous n'avons pas d'évaluation précise. On peut simplement souligner le fait que chaque pirate est un nouveau diffuseur. Le problème d'Internet, c'est que c'est un phénomène exponentiel. À partir du moment où d'un point, il y a un certain nombre de reproductions, chaque reproduction devient elle-même un point de nouvelle reproduction. Le phénomène est immense. Je dirai même qu'à l'heure actuelle, il n'est pas chiffrable.

    -- Votre Charte ne prévoit aucune sanction ?

    -- La Charte ne peut pas prévoir de sanction sinon elle se substituerait à la justice. Elle prévoit simplement un moyen d'éliminer les foyers de piratage ostensiblement installés au vu de tous. Elle permet de les fermer très rapidement. »

    Le président.

    « Est-ce que vous avez d'autres questions à des témoins ?

    -- Oui monsieur le président. À madame la mère de famille.

    -- Qui a plusieurs qualités, mais c'est celle pour laquelle elle vient aujourd'hui.

    -- Ce sont vos enfants qui utilisent votre ordinateur, ou vous-même ? »

    Catherine Villain.

    « Moi, avec une vigilance qui n'est évidemment pas la leur.

    -- Est-ce que vous savez combien de logiciels vous utilisez ?

    -- Aucune idée.

    -- Est-ce que vous avez une licence pour tous ces logiciels ?

    -- A priori oui !

    -- Est-ce que vous en avez déjà chargé en ligne ?

    -- Non !

    -- Est-ce que vous avez fait des sauvegardes de pages Web sur votre disque dur ?

    -- Non.

    -- Jamais ? Jamais rediffusé ?

    -- Jamais ! Je suis désolée… »

    Le président.

    « Madame a des principes.

    -- Le témoin a été bien choisi !

    -- On lui en donnera acte, et elle a de bonnes fréquentations.

    -- Tout à fait ! Je n'ai plus de question.

    -- Il est certain que, comme dans certaines matières, le fait d'avoir une sorte d'ascétisme ou d'avoir des règles de vie monacale, permet d'éviter toute contamination… Monsieur l'avocat général… »

    L'avocat général.

    « Une question à monsieur Novaro. C'est une question que je pose au policier : comment faites-vous pour procéder à un contrôle d'identité sur Internet ? »

    Pierre Novaro.

    « Mais, on ne fait pas, naturellement, de contrôle d'identité sur Internet. Je voudrais savoir dans quels cas nous devrions faire des contrôles d'identité sur Internet.

    -- Lorsqu'il vous apparaît qu'un délit est en train ou sur le point de se commettre.

    -- Je vois ce que vous voulez dire. Il existe une recommandation 95-13 du Conseil de l'Europe qui n'est pas un texte de droit positif -- c'est une recommandation du Conseil de l'Europe -- mais qui est actuellement rediscutée dans la même enceinte et qui envisage de permettre aux policiers de poursuivre leurs investigations en dehors de l'enceinte où ils se trouvent et même en dehors du territoire dans lequel ils agissent, en cas d'urgence, quitte à aviser ensuite les autorités localement compétentes.

    -- Est-ce que vous avez des moyens techniques de localiser géographiquement un serveur qui met à disposition des contenus illicites ? »

    Le président.

    « Grosso modo : quand je suis connecté, arrivez-vous à me trouver ? »

    Pierre Novaro.

    « Pour l'abonné c'est facile : puisqu'il est abonné, il est connu. Sur la base de la bonne volonté du fournisseur d'accès, on peut retrouver l'abonné. Mais c'est un peu insuffisant parce qu'on n'agit que d'un seul côté : le côté aval, et ce qui est le plus intéressant, à mon avis, c'est le côté amont. Ce qui me semble souhaitable, c'est d'arriver à ce statut du fournisseur d'accès -- statut des gestionnaires de serveurs -- pour pouvoir remonter la communication et arriver au véritable auteur. Mais pour l'instant, on ne fonctionne que sur la bonne volonté des participants et cela me paraît être un point à traiter dans l'avenir.

    -- J'ai lu, dans un journal du soir de grande diffusion et à haute portée culturelle, que les fournisseurs d'accès envisageaient une grève si on leur soumettait des mesures de cette nature.

    -- En échange de ce type de mesures, c'est leur non-responsabilité, aujourd'hui, malheureusement, ils sont en première ligne en matière de responsabilité.

    -- Est-ce que vous avez d'autres questions à d'autres témoins ? »

    L'avocat général.

    « J'ai d'autres questions à d'autres témoins. À madame Soubeyrand : en ce qui concerne l'étiquetage des contenus illicites, qui s'en chargera et comment pensez-vous qu'il sera procédé ? »

    Catherine Soubeyrand.

    « Actuellement, ce qui est défini, c'est une infrastructure technique. Pour ce qui est de la définition des services ou des modalités, cela est laissé au choix de chaque service ou de chaque pays qui mettrait en place… Il faut bien faire la part entre ce qui est une infrastructure technique et ce qui est une profession qui demanderait un statut juridique.

    -- Pensez-vous que l'étiquetage aura une réelle efficacité puisqu'il sous-entend la bonne volonté de tous les partenaires au niveau international ?

    -- Il est largement encouragé par l'Union Européenne. Par exemple, au mois de décembre, ils ont rédigé un texte Rendre l'Internet sûr. Une des mesures est d'encourager le filtrage et développement de l'étiquetage des contenus. »

    L'avocat général.

    « Une dernière question, à monsieur Beaussant à propos de la Charte de l'Internet. Monsieur Beaussant, vous n'ignorez pas que le principe de la délinquance est le non-respect des règles. Pensez-vous qu'en ajoutant une charte, cela va résoudre les problèmes ?

    Antoine Beaussant.

    « La Charte est le texte sur lequel les acteurs de bonne volonté -- ceux qui souvent veulent respecter les règles -- vont se mettre d'accord. Après c'est une chaîne, une chaîne à la fois contractuelle et de solidarité…, qui joue entre les acteurs. L'un repère un contenu illicite et ce caractère illicite est confirmé par l'organisme d'autorégulation ; à ce moment, tout le monde a l'information et est susceptible de rendre ce contenu inaccessible. C'est simplement un moyen donné aux acteurs, pour stopper eux-mêmes, de manière très rapide et très efficace des contenus préjudiciables.

    -- N'estimez-vous pas qu'on risque de tomber dans une espèce de course entre le chat et les souris, notamment en raison des nombreux sites miroirs qui naissent, précisément, au moment où l'on interdit un site illicite ?

    -- Chaque page Internet est repérable par une adresse. Cette adresse, elle, est constante même quand elle est portée par un site miroir. Elle pourra donc être stoppée lorsqu'elle sera repérée par un des acteurs adhérant à la Charte. Là encore, le système est relativement simple. Je dirai que le système d'autorégulation n'est pas conçu pour éradiquer, ce ne serait pas possible, d'ailleurs aucun système de régulation humaine ne permet de faire ça. L'objectif, c'est de faire en sorte qu'il ne puisse pas s'installer sur le réseau, de manière durable et ostensible, des sites effectivement préjudiciables. C'est un système de régulation, d'autorégulation. »

    Le président.

    « Pas d'autre question, monsieur l'avocat général ? Très bien. La parole est à la défense pour ses questions. Ensuite, on donnera la parole aux membres du jury. »

    L'avocat de la défense.

    « Monsieur le président, j'ai une question au commissaire Novaro… J'ai écouté attentivement monsieur le commissaire et je dois dire que j'ai beaucoup apprécié sa déposition. On a assez peu l'habitude d'entendre des policiers parler droit or je n'ai entendu que du droit : coopération judiciaire, statut juridique des fournisseurs d'accès, mettre en place un instrument pénal… Que fait la cyber police ? »

    Pierre Novaro.

    « Monsieur le président… puis-je d'abord me permettre de dire un mot à la défense de mes collègues qui, à ce que j'en connais, connaissent bien le droit.

    Ceci dit, pour répondre à la question qui m'est posée… que fait la police ? Et bien la police est organisée. Elle s'est organisée en mettant, d'une manière générale, des services en place pour rechercher la criminalité informatique. Je parlais de cette criminalité concernant les informations, à savoir : des services centralisés qui animent des correspondants dans les services régionaux de police judiciaire pour rechercher ces infractions commises par, au moyen de et contre l'ordinateur. Ce service là existe depuis cinq ans, ce qui nous permet d'avoir aujourd'hui des statistiques plus éclairantes sur l'action de la criminalité relative à l'information, sous la rubrique criminalité informatique. Nous avons mis en place en fin d'année dernière, et elle commence à tourner effectivement depuis quelques mois, la Cellule d'Analyse Internet qui bénéficie d'un apport de fonctionnaires de différentes directions de police afin de rechercher grâce à Internet, à travers ce qui apparaît sur Internet, des infractions tout à fait classiques qui pourraient concerner différents services. Par exemple, on va pouvoir repérer des Webs où on trouve des cours de bourse de produits stupéfiants. Lorsqu'on a apparition de ce qui pourrait être une infraction chez nous, on communique l'information aux services de police judiciaire compétents. Que ce soit en rapport avec des mauvais traitements à enfant, des produits stupéfiants ou des affaires financières, tout ça est communiqué aux personnes compétentes.

    Nous n'avons pas voulu développer Internet dans tous les services, dans tous les commissariats. On voulait que les policiers soient d'abord dans la vraie rue avant d'être dans la cyber rue et pour ce terrain nouveau, pour ce territoire nouveau, il fallait des policiers qui soient capables de rechercher des infractions, de voir des infractions apparaître d'une nouvelle manière, pour ensuite les confier, comme ça se fait habituellement, aux services spécialisés. Alors, cette cellule créée depuis quelques mois a commencé à fournir des informations aux services, activité par activité, et elle va servir également d'observatoire, c'est-à-dire qu'elle va nous permettre de dire ce qu'il faudra faire à l'avenir : comment s'organiser, faut-il la développer, faut-il connecter sur Internet quelques autres services ? En attendant, c'est à la fois un moyen de travail et un observatoire pour l'avenir.

    -- Avez-vous des exemples concrets à nous donner à propos de ces activités dont vous faites état à l'instant ?

    -- J'avais cité les cours de la bourse des produits stupéfiants où l'on trouve le prix de certaines matières en international, mais on ne sait pas bien encore à quel endroit se les procurer. En attendant, c'est visiblement quelque chose qui était intéressant pour les services. On a des images qui laisse apparaître de la prostitution, mais ce n'est pas la prostitution qui va être poursuivie, on va parler de droit : est-ce que c'est du racolage ? Voilà des questions juridiques qui se posent encore. On a des images de pédophilie, des images qui sont des mauvais traitements à des enfants et là, autre question juridique qui se pose : la question de la coopération internationale vu que cela arrive de pays avec lesquels, justement, on n'a pas de coopération internationale. Il nous faudra, non seulement des instruments, mais il nous faut aussi un droit au fond et il nous faut la volonté de coopérer des autorités de ces pays. Mais en attendant, on a trouvé un certain nombre d'images, ça nous permet de mettre le doigt justement où il y a des difficultés. »

    Le président.

    « Est-ce que vous avez des questions à d'autres témoins ? »

    L'avocat de la défense.

    « Monsieur Beaussant, une question s'il vous plait. C'est un travail très important qu'a fait monsieur Beaussant, la cour a sa Charte sur le bureau : article 2, je crois, vous avez résumé en huit lignes le Code de la Consommation… article 3, cela doit être les Libertés Publiques en douze lignes… article 5, le Code du Travail peut-être… Je veux dire que c'est un travail exceptionnel. Quelles sont vos sources d'inspiration monsieur Beaussant ? »

    Antoine Beaussant.

    « Le début de votre intervention, cher maître, me laissait présager en effet quelques… bon… je vais m'expliquer effectivement.

    Cela a fait l'objet d'un débat : fallait-il ou non rappeler la loi ? On ne peut pas résumer la loi, vous avez raison de dire que résumer le Code de la Consommation en douze lignes est une gageure. L'un des constats qui a été fait et qui est très important, c'est qu'on est habitué dans le monde des médias à avoir quelques diffuseurs qui sont des très grosses entités, des très grands médias, qui diffusent vers des millions de personnes. Sur Internet, il n'en est pas du tout de même puisque c'est un réseau de réseaux, c'est un réseau d'utilisateurs où chaque utilisateur -- ils sont des millions -- est à la fois consommateur et utilisateur d'Internet et à la fois diffuseur et média lui-même. Donc, on est dans une problématique de régulation qui n'est pas de réguler l'activité de quelques sociétés hyper puissantes mais de réguler l'activité d'émission, l'activité média de plusieurs dizaines de millions d'utilisateurs privés et qui ne connaissent pas parfaitement tous les méandres et les milliers de pages du droit.

    Je vous retournerai la politesse mon cher maître, qui est de savoir comment faire connaître à l'ensemble des citoyens les milliers, les dizaines de milliers de pages que représentent les différents codes. Il nous a semblé, malgré tout, qu'il était utile de résumer, de donner les principales règles qui étaient en usage dans notre pays et de rappeler ces règles de manière à ce qu'elles puissent être facilement respectées par tous les utilisateurs d'Internet.

    Le président.

    « Vous avez des questions à d'autres témoins ? »

    L'avocat de la défense.

    « Oui, à madame Soubeyrand. Madame Soubeyrand, vous avez donc indiqué que vous aviez travaillé à la mise en place d'un système de filtrage qui responsabilise les utilisateurs. Je voudrais que vous nous indiquiez quels sont les critères, quels sont les domaines qui sont les plus retenus par ceux qui définissent ce que vous avez appelé des étiquettes ? »

    Catherine Soubeyrand

    « Les critères vont effectivement être définis par chaque service. Ceux qu'on voit souvent apparaître sont par exemple : le sexe, la nudité, la violence et le langage. Ce sont ces quatre critères qui ont d'ailleurs été retenus par le service qui a attribué le plus grand nombre d'étiquettes à ce jour.

    -- Est-ce que selon vous, les contenus illicites, manifestement illicites sont -- et là, je vous demanderai une réponse brève -- quantitativement très importants, importants ou peu importants ?

    -- Je pense qu'ils sont quantitativement peu importants.

    -- Merci. »

    Le président.

    « D'autres questions ?

    -- Oui, à madame Villain. Madame Villain, vous avez deux enfants je crois ? »

    Catherine Villain.

    « C'est ça.

    -- Je dois dire d'ailleurs que ma cliente aime beaucoup les enfants et qu'elle souhaite également en avoir, mais… si tant est qu'on lui laisse la liberté…

    Madame Villain, je voudrais savoir combien d'heures par jour vos enfants passent sur le réseau Internet.

    -- Relativement peu pour le moment.

    -- Merci madame.

    -- Mais en fait, mon inquiétude concerne plus la prévention.

    -- Hum ! Par rapport à des articles de presse ?

    -- Il vaut mieux se poser des questions avant, qu'après.

    -- Merci. »

    Le président.

    « Oui, c'est le principe de la prévention. Est-ce que mesdames et messieurs les jurés ont des questions à poser ? »

    Arnaud Brunet.

    « J'ai une question à madame Villain qui est une mère de famille, qui a le souci de la protection de ses enfants. Je voulais lui demander si elle avait connaissance de logiciels de contrôle parental, dont on a déjà parlé et si oui, est-ce qu'elle les utilise ?

    -- Je n'en avais pas connaissance jusqu'à présent. Je vais d'abord me renseigner pour savoir ce que c'est. J'ai le sentiment que beaucoup de choses peuvent se pirater ou se contourner. J'attendrai d'abord d'être convaincue par l'efficacité. »

    Le président.

    « Je crois que c'est un vieux principe français. Comme on n'a pas le sentiment d'avoir toutes les informations, toute la connaissance, à chaque fois, dans tous les problèmes de société, on se méfie et dans d'autres problèmes, on n'a pas tort.

    -- C'est ce que je voulais vous dire tout à l'heure, monsieur le président. À partir du moment où les parents sont mal renseignés, ils ne peuvent absolument pas faire la prévention. Il y a un problème d'éducation ou en tout cas de distribution du savoir, des risques et des bénéfices qu'on peut en tirer.

    -- Bien, madame l'assesseur va poser une question. »

    L'assesseur.

    « J'aurai deux questions. La première s'adresse à madame Soubeyrand. J'aurais aimé savoir ce qu'était le consortium W3C, notamment, quel était son statut juridique.

    La seconde question s'adresse à monsieur Beaussant. J'aurais aimé savoir quelles étaient les sanctions en cas de non-respect de la Charte.

    Catherine Soubeyrand.

    « Je ne connais pas exactement le statut juridique. C'est une association aussi bien de développeurs de logiciels que d'universités. Je pense que l'information se trouve facilement sur le site. »

    Le président.

    « C'est un organisme privé, tout au moins. Et vous monsieur, pour répondre. »

    Antoine Beaussant.

    « Il n'y a pas de sanction, à proprement parler, prévue dans la Charte de l'Internet. Il y a, en revanche, des effets puisque les avis émis par l'organisme d'autorégulation sont destinés à être suivis par les acteurs de l'Internet et amènent à la coupure, à l'inaccessibilité du site mis en cause. Il y a un effet évident, qui peut être perçu d'ailleurs par certains -- les auteurs de ces sites -- comme une sanction. »

    Le président.

    « D'autres questions ? »

    José Monteiro.

    « Merci monsieur le président. Monsieur le commissaire, cette cour, ce matin, a condamné Bill Gates à une amende de cent francs. On sait très bien que monsieur Bill Gates a une fortune assez coquette de l'autre côté de l'Atlantique. Est-ce que vous pouvez nous aider à récupérer cette amende ? »

    Pierre Novaro.

    « Absolument. On n'est plus du tout dans le droit réservé à Internet, si tant est qu'il existe un droit spécifique. On est dans un domaine tout à fait classique : une décision de justice a été prise, elle a pu être prise sur la base de faits entièrement commis en France, sur une victime entièrement en France, sur une victime hors de France ou commis à l'international. Elle ne peut en principe être poursuivie que par des autorités françaises sous réserve -- sous réserve -- d'accords spécifiques internationaux qui auraient pu être passés avec les États-Unis. Mais là, on n'est pas du tout dans… »

    Le président.

    « Il suffit d'attendre la prochaine fois que monsieur Bill Gates arrive en France pour mettre à exécution. C'est sur ce principe qu'on récupère les amendes.

    -- Voilà. La prochaine fois qu'il viendra en France…

    -- On lui demandera l'amende, je crois qu'il sera prévenu ! Est-ce qu'il y a d'autres questions des jurés ? »

    Marie Plassard.

    « Une question à madame Villain. Je voudrais savoir si vous connaissez le contenu du programme scolaire que vos enfants vont suivre ?

    -- Oui.

    -- Tout le contenu ?

    -- Année par année oui. Je m'y intéresse à chaque nouvelle année.

    -- Bien sûr. Merci. »

    Le président.

    « Est-ce qu'il y a d'autres questions de jurés ?

    Je voulais indiquer qu'en vertu du pouvoir discrétionnaire que m'a apporté le Code de Procédure Pénale, j'ai fait une instruction complémentaire avant d'arriver à la barre de cette cour et j'ai pu voir que, d'une part, la gendarmerie qui n'est pas représentée aujourd'hui, avait développé également une équipe qui est connectée en permanence sur Internet et qui regarde ce qui se passe… Il est bien connu que les gendarmes et les policiers sont aux carrefours, ils regardent ce qui se passe à droite et à gauche. Et j'ai même vu un autre site, et cela m'amène à poser une question à monsieur le commissaire.

    Une section de recherche dont je ne vais pas donner le nom, indique à tous les citoyens qu'ils peuvent s'adresser à la section des recherches de la cour d'appel de X pour tout renseignement qui pourrait aider les enquêteurs. Est-ce que vous pensez qu'Internet peut avoir un effet de citoyenneté, de civisme et est-ce qu'il n'y a pas des dangers ? »

    Pierre Novaro.

    « Pour le cas que vous citez, monsieur le président, je pense qu'il s'agit d'une section de recherche de la gendarmerie…

    -- Oui, de la gendarmerie, c'est une initiative locale je crois…

    -- Je ne peux donc pas en parler mais, d'une manière générale, le ministère de l'Intérieur a ouvert un site Web -- comme l'on fait tous les ministères d'ailleurs -- et sur ce site il y a des informations à caractère administratif, des informations générales, mais pas d'appel à témoins ou d'appel à informations dans le cadre d'enquêtes à caractère judiciaire. Pour des questions historiques ou culturelles… nous ne souhaitons pas le faire. Cela c'est fait dans d'autres pays mais nous, aujourd'hui, ne souhaitons pas le faire.

    -- On peut envisager des portraits robots diffusés sur Internet, des choses comme ça ?

    -- Ça pourrait s'envisager mais je ne pense pas, encore une fois, qu'Internet permette d'aller plus loin que ce qui est fait généralement sur d'autres supports d'information.

    -- Bien. Oui ? »

    L'avocat de la partie civile.

    « Je sollicite l'autorisation de poser deux questions supplémentaires à monsieur le commissaire Novaro. Vous nous avez parlé tout à l'heure de quinze pays qui faisaient partie de votre groupe de réflexion… »

    Pierre Novaro.

    « C'est l'Union Européenne…

    -- Donc ça n'est que l'Union Européenne plus quatre pays : États-Unis, Canada…

    -- Australie, Nouvelle Zélande.

    -- La Patagonie ?

    -- Ils n'ont pas présenté leur candidature…

    -- La Chine ?

    -- Mais je vous le disais, un des points sur lesquels il faudra arriver plus tard est l'extension de notre assise territoriale.

    -- D'accord, merci. »

    Le président.

    « La cour remercie les témoins et les experts d'avoir éclairé la justice du cyberspace. Je vais vous proposer de suspendre nos débats jusqu'à 15 h 15. L'expérience a montré que le jury a besoin de délibérer sur des questions importantes, il s'agit d'une première qui va avoir des effets… »

    L'avocate de la partie civile.

    « Il s'agit de pré délibérations, dans ce cas, monsieur le président…

    -- C'est pour avoir du temps pour délibérer après, ce n'est pas pour délibérer maintenant. Et donc pour avoir un petit peu de temps. L'audience est suspendue, elle reprendra à 15 h 15 avec les plaidoiries des parties civiles, de l'avocat général et de la défense. »

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Avant-propos
Introduction
Chefs d'inculpation
Inculpation 1
Jury
Partie civile
Témoins, experts
Interrogatoire
Lecture de l'acte
Demande report
A. Miller
Q. Miller
A. Lasfargues
A. Soriano
A. Jousselin
Q. témoins
Pièces
Reprise
Partie civile
Avocat général
Défense
Inculpation 2
Lecture de l'acte
Témoins, experts
A. Guglielmi
A. Aumont
Q. témoins
A. Pouzin
A. Georges
Q. témoins
Partie civile
Avocat général
Défense
Accusé
Verdict
Inculpation 3
Jury
Lecture de l'acte
Interrogatoire
Pièces
Témoins, experts
A. Mathias
A. Martin Lalande
A. Léon
A. Pélissier
A. Godin
Q. témoins
Partie civile
Avocat général
Défense
Inculpation 4
Lecture de l'acte
Témoins, experts
Pièces
A. Villain
A. Beaussant
A. Novaro
A. Soubeyrand
Q. témoins
Partie civile
Partie civile
Avocat général
Défense
Clôture
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